Satellites sans fusée: une technologie 100 % propre promet des centaines de lancements orbitaux par an

Un lanceur centrifuge propulse des satellites à Mach 6 avec moins de propergols. Tests NASA et objectif de cadence élevée.

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L’idée de propulser des satellites sans fusée refait surface, avec une promesse plus propre. Face aux coûts et aux retards, une piste radicale s’impose pour alléger l’accès à l’orbite. Cette approche, née en Californie, bouscule déjà les plans des acteurs établis.

Un lanceur centrifuge qui change la donne

SpinLaunch mise sur une centrifugeuse géante pour donner à une charge utile une vitesse initiale proche de Mach 6. Le principe est simple en apparence, mais ambitieux en pratique. La charge est accélérée sous vide, puis éjectée par un conduit vers la haute atmosphère. Une étape finale à propulsion chimique termine l’ascension de petits satellites.

Des essais suborbitaux ont eu lieu à Spaceport America depuis 2021, avec plus d’une dizaine de lancements de démonstration. Des capteurs de la NASA ont volé pour évaluer la résistance des composants. Les résultats publiés indiquent des contraintes mécaniques élevées, mais gérables avec des conceptions adaptées. Le pari consiste à industrialiser ces briques pour un service fiable.

L’argument phare reste l’impact environnemental, présenté comme « 100 % propre » pour la phase initiale. La réalité est plus nuancée, car un petit étage fusée est toujours nécessaire. Le gain potentiel demeure intéressant sur la masse de propergols consommés et la cadence. Il pourrait favoriser l’accès à l’orbite basse pour de futurs satellites de constellations.

« Lancer plus souvent, avec moins d’empreinte, reste l’objectif. »

Que change cette approche pour le marché ?

Le lancement est déjà entré dans une logique de volume, avec des constellations toujours plus denses. Cette tendance pousse à rechercher des architectures sobres, modulaires et flexibles. SpinLaunch promet une cadence élevée et des coûts unitaires réduits. Cela bousculerait la logistique d’intégration des satellites et des opérateurs.

La contrainte majeure, c’est la résistance au choc dynamique d’éjection, qui peut dépasser 10 000 g. Des encapsulages, des liaisons renforcées et des composants spécifiques deviennent nécessaires. Cela pèse sur le design, le planning et le test. Les équipes devront qualifier chaque famille de satellites pour ce profil d’ascension.

  • Accélérateur suborbital de 33 m déjà utilisé en essais.
  • Version orbitale annoncée autour de 100 m de diamètre.
  • Vitesse de sortie visée proche de 7 500 km/h.
  • Campagnes d’essais à Spaceport America depuis 2021.
  • Étape finale par petit étage fusée pour l’insertion.

Fiches éclair : systèmes et lanceurs cités

SpinLaunch — Accelerator Suborbital (Système centrifuge de lancement spatial). Pensé pour tester l’architecture à échelle réduite, il a validé la cinématique d’éjection et les charges structurales.

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SpinLaunch — Accelerator Orbital (Version agrandie de l’Accelerator Suborbital). L’objectif affiché est d’atteindre l’orbite basse avec un étage d’appoint, pour des charges modestes utiles aux satellites de nouvelle génération.

SpaceX — Falcon 9 (Lanceur spatial ; Block 5 mentionné). Réutilisable et robuste, il transporte de grands lots de satellites grâce aux vols partagés et a imposé un standard de cadence.

SpaceX — Falcon Heavy (Lanceur spatial). Conçu pour les missions massives, il sert de référence de performance, mais reste plus coûteux pour de petits satellites spécialisés.

Réglementation, fiabilité et coûts réels

Les autorités scrutent le bruit, la sécurité des trajectoires et les retombées possibles. Ces points conditionnent les sites de tir, les couloirs aériens et les zones maritimes. Les opérateurs demandent des garanties contractuelles claires. Sans cela, ils resteront sur des vols partagés pour placer leurs satellites.

Le coût au kilogramme reste la métrique clé, bien que la disponibilité pèse autant. Une cadence quotidienne changerait l’équation de planification, surtout pour des déploiements par salves. Les chaînes d’approvisionnement devront suivre, avec des systèmes plus tolérants aux vibrations. Ce cap est décisif si l’on veut industrialiser l’envoi de satellites dédiés.

Cap technique, risques et maturité du concept

Le vide poussé de la chambre réduit la traînée interne, donc les pertes. Pourtant, la jonction entre la chambre et l’atmosphère reste un défi d’étanchéité et de cycles. La mécanique des matériaux doit tenir des centaines d’ouvertures rapides. Par conséquent, la maintenance conditionnera la cadence et les prix affichés pour les satellites.

La météo compte davantage qu’on ne l’imagine pour une trajectoire initiale quasi balistique. Des vents de cisaillement peuvent dégrader la précision au largage d’étage. Ainsi, des fenêtres plus strictes pourraient s’imposer selon les sites. Cela influe sur la qualité de service recherchée par les opérateurs de satellites.

Les charges électroniques doivent être « durcies » par résine, bridage et redondance. De plus, les tests HALT/HASS peuvent accélérer la qualification, mais renchérissent l’industrialisation. Les fournisseurs devront publier des courbes de survie sous contrainte. En bref, l’écosystème doit apprendre à concevoir des satellites nativement adaptés à ces profils d’ascension.

Le risque d’échec initial n’est pas nul, surtout lors des premières tentatives orbitales. Cependant, des contrats de démonstration peuvent partager ce risque. Les assurances ajusteront leurs primes selon les statistiques réelles. À terme, un carnet de vol dense rassurera les constellations qui multiplient leurs satellites.

Impact environnemental et empreinte locale

Le système réduit l’usage de propergols au décollage, ce qui est un gain évident. En revanche, l’empreinte énergétique du site et l’électricité consommée doivent être quantifiées. Des bilans complets de cycle de vie seront nécessaires pour convaincre. Les opérateurs de satellites les réclameront avant d’engager des séries.

Les communautés voisines surveilleront bruit, poussières et trafic routier. Les mesures d’atténuation feront partie du permis d’exploitation. Aussi, des retours d’expérience publics aideront à objectiver le débat. C’est indispensable pour un déploiement à échelle des besoins en satellites.

Ce qu’il faut surveiller dans les prochains mois

Le calendrier de la première tentative orbitale servira de baromètre. Des délais peuvent survenir sur la fabrication de l’anneau de 100 m. Ensuite, la qualification de l’étage final définira la performance utile. Les clients attendent une courbe de montée en puissance compatible avec leurs satellites.

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Les partenariats techniques, dont ceux engagés avec des agences, seront clés. Ainsi, des campagnes de tests partagées pourraient normaliser les profils d’accélération. Les résultats publiés permettront d’affiner les guides de conception. Ils aideront des intégrateurs à certifier des familles de satellites.

Sur le marché, la comparaison restera vive avec les lancements partagés bon marché. Falcon 9 a imposé un prix plancher difficile à battre. Pourtant, un service à haute fréquence séduira des missions urgentes. Il pourrait offrir des créneaux dédiés pour des satellites qui ne veulent plus attendre.

La décennie s’annonce comme un test d’endurance pour ces technologies. De plus, l’équilibre entre coût, cadence et fiabilité décidera des gagnants. Les opérateurs veulent des feuilles de route crédibles et mesurables. Ils verront dans ces démonstrations une option sérieuse pour certains satellites.

Crédit photo © LePointDuJour


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